Hypersensibilités sensorielles, comment intervenir ? (1/2)

Votre enfant présente des hypersensibilités sensorielles, comment intervenir ?

Quand votre enfant est tout petit, qu’il a moins de 3 ans, c’est le moment idéal pour intervenir. Plus l’aide est mise en place précocement, moins il est difficile d’enrayer ces difficultés. A l’inverse, plus on attend, et plus cela devient complexe parce que les sensations perçues par l’enfant se tissent étroitement avec d’autres niveaux de développement.

Avant 30-36 mois, les parents ont, sans le savoir, presque toutes les cartes en mains. Pourtant, spontanément, il leur est difficile de savoir comment intervenir parce que cela va plutôt à l’encontre de leur instinct de parents.

Par exemple, Léonie et Ursule n’aiment pas la pâte à modeler. Ils n’apprécient pas non plus jouer dans le bac à sable, et quand, à table, la purée s’accroche sur leurs doigts, c’est le drame. Que vont faire spontanément leurs parents ?

– ils vont insister en encourageant : t’es sûr tu veux pas jouer ? c’est super pourtant, regarde… touche… ça ne fait pas mal… Ils vont attendre un engagement de l’enfant dans l’activité. En vain.

– ils vont se réjouir (au départ seulement), que leur enfant soit sensible « à la saleté » et s’empresser d’essuyer leurs mains.

– ils vont anticiper les aversions de Léonie et Ursule en les protégeant de toutes ces activités qu’ils ont très vite identifiées comme étant peu plaisantes pour eux

Tout cela est plutôt logique. Les parents se réjouissent d’une part d’avoir des enfants « propres », et tendent depuis leur naissance à leur offrir  le plus juste confort sensoriel.

Sauf que…

Sauf que malheureusement, en les accompagnant ainsi, les parents vont permettre à la vulnérabilité de s’installer, insidieusement, jusqu’à ce que ces inconforts du départ deviennent des événements réellement insupportables pour l’enfant

Que se passe-t-il sur le plan développemental ?

En diminuant les propositions associées à des inconforts, l’enfant devient de plus en plus sensible sur le sens concerné. On peut retenir cette réalité développementale : moins on stimule un sens, plus il devient sensible : le système nerveux, peu habitué à ces stimulations met très vite l’individu concerné en alerte, comme pour traiter un danger immédiat. Comme notre système nerveux se régule en fonction de nos habitudes de vie, selon l’environnement dans lequel on vit, un enfant peu stimulé sur certaines entrées sensorielles manifestera un inconfort (hypersensibilité) de plus en plus important.

Quelles aides pour les parents de Léonie et Ursule ?

  1. Pour commencer, modifier ses croyances 

– ne jamais imaginer que ne plus proposer certaines stimulations peuvent aider l’enfant.

– penser chaque jour à ne pas « trop » protéger l’enfant, en proposant des stimulations « ajustées » (moins fortes, ou associées à d’autres plus plaisantes pour l’enfant)

– ne pas insister / encourager avec seulement des mots pour pousser l’enfant à explorer, mais s’engager avec l’enfant et accompagner ses émotions de manière positive.

2. Concrètement  faire quelques aménagements :

 jouer devant l’enfant avec la pâte à modeler, sans attendre qu’il manipule spécialement, prendre du plaisir pour deux, devant lui. Plutôt qu’un très joli bonhomme, le tout petit aimera peut-être plutôt un gros serpent qu’on coupe avec un couteau à beurre pour en faire plein de morceaux pour nourrir l’ogre. Vous aurez saisi l’importance du plaisir partagé, au coeur de récits qui amusent les tout petits enfants. Parfois, pris d’empathie, le parent vit l’inconfort de l’enfant dans sa chair, et peine à montrer un réel enthousiasme parce qu’il n’a jamais assisté à l’effet de leur propre plaisir sur leur enfant petit.

la purée au bout des doigts peut sans doute attendre un peu, encore une cuiller, ou disparaitre à coups de langue, dans la bouche de l’enfant, dans la bouche de son parent. Jour après jour, l’enfant peut apprendre à patienter, et dans le même temps à tolérer cette sensation.

– offrir des propositions de jeux qui permettront à l’enfant d’avoir quand même du plaisir sensoriel dans l’activité, via un autre sens simultanément. Si Ursule et Léonie n’aiment pas le sable, ils aiment peut-être les moulages, appuyer dans le sable avec des emporte-pièces (autre sens en jeu : sens proprioceptif), ou jouer à chercher leurs bonhommes préférés qui jouent à cache cache dans le sable (autre sens en jeu : sens visuel) ? Si papa enfonce son index dans le sable en faisant de gros bruits rigolos (sens auditif), il est probable que la patience paie, et que quelques minutes à jouer seul devant l’enfant suffisent pour lancer l’action.

Enfin, on ne le dira jamais assez, rendre chaque jeu « fréquent »(quotidien au départ), et « cohérent » (qui raconte quelque chose dans le quotidien) dans la vie de l’enfant, permettra d’habituer le système nerveux de l’enfant aux sensations de son environnement, il comprendra donc mieux ce qui lui arrive, et sera plus serein, moins inconfortable.

3. Identifier les sens « plaisir » de l’enfant pour s’appuyer dessus.

Au quotidien, il est donc intéressant d’identifier à travers ce qui est difficile pour l’enfant, quel sens est « hypersensible » ou « irritable ». Ensuite, les parents peuvent imaginer des petits jeux / missions du quotidien qui sont susceptibles de stimuler le sens repéré : ils peuvent alors « jouer pour deux » devant l’enfant, mais aussi, choisir ces jeux en fonction des autres sens qu’ils stimulent et qui sont appréciés par l’enfant

Par ailleurs, l’accompagnement précoce des émotions de l’enfant va se révéler indispensable pour que les activités se passent au mieux, que les peurs soient dépassées,  que les chagrins soient brefs.

Pour que les appréhensions de l’enfant puissent être dépassées, il lui faudra des parents patients, bienveillants, drôles, encourageants, n’ayant pas autant de craintes que l’enfant.

Nous poursuivrons dans les articles à venir autour de différentes notions :
– combien de sens entrent en jeu dans le développement de l’enfant
– que faire avec les enfants de plus de 3 ans.

Si vous êtes pressés d’en savoir plus, n’hésitez pas à lire cet article sur Sensorialité et orthophonie

Ou découvrez cet ouvrage très bien fait pour vous aider à comprendre et accompagner pas à pas les difficultés sensorielles des enfants :

En attendant, si vous avez des questions, ou des suggestions, laissez un commentaire !